Les miracles sont indissociables de la prédication de saint Vincent Ferrier, comme ils sont indissociables de la prédication de l’Evangile. « Voici les signes qui accompagneront ceux qui deviendront croyants : en mon nom ils expulseront les démons ; ils parleront en langues nouvelles ; ils prendront des serpents dans leurs mains et, s’ils boivent un poison mortel, il ne leur fera aucun mal ; ils imposeront les mains aux malades et les malades s’en trouveront bien (18)».
Certains des miracles attribués à saint Vincent Ferrier ont des airs de paraboles, un peu à la manière des Fioretti de saint François d’Assise. Ils sont porteurs d’une morale, comme le jour où mangeant une assiette de petits pois chez sa sœur Constance, à Teulada, il mit de côté ceux qu’elle avait volés dans le jardin de sa voisine pour compléter sa maigre récolte. Une autre fois, l’évêque lui ayant interdit de faire des miracles qui mettaient en émoi toute la ville, il laissa en suspension dans les airs un maçon qui tombait d’un toit pour aller demander la permission de le faire atterrir en douceur. Dans le premier cas il s’agit de donner une leçon d’honnêteté, dans le second cas une leçon d’obéissance. Mais la plupart du temps il s’agit de soulager, de guérir ou d’apporter aux vérités qu’il énonce la sanction de l’autorité divine.
Dans la vie de saint Vincent Ferrier, comme dans l’Écriture Sainte, le miracle a plusieurs fonctions. Il est une communication de l’amour de Dieu : il est le signe que Dieu vient au-devant de la personne pour la sauver de ce qui entrave sa vie. Il a une fonction de révélation : il dévoile l’identité de celui qui agit. Il a une fonction d’attestation : il confirme le message et donne autorité au messager. « Si vous ne me croyez pas, croyez du moins à cause des œuvres elles-mêmes (19) ». Le miracle est un acte de salut tant par le bienfait corporel que par le bienfait spirituel de l’appel à adhérer à Jésus et au Royaume de Dieu qu’il inaugure. Le miracle sauve en ce sens qu’il restaure la nature et rétablit l’homme dans sa dignité. Enfin le miracle montre aussi que la prédication a provoqué le retour à la foi et rétabli la paix. « Ta foi t’a sauvé, va en paix (20)».
Vincent est passé en faisant le bien (21). Non seulement grâce au don de thaumaturge dont il semble avoir bénéficié (on lui attribue quelques trois mille miracles) mais aussi grâce aux œuvres de charité qu’il a créées, dont certaines existent toujours, comme l’orphelinat de Valence, fondé en 1410, ou l’archiconfrérie de la Sanch, fondée à Perpignan en 1416 pour prendre soin des prisonniers et des condamnés à mort. À travers ses œuvres il manifestait son amour pour les pauvres, les exclus, les humiliés.
(18) Mc 16, 17-18
(19) Jean 14, 11
(20) Marc 5, 34
(21) Ac 10, 38 : « Jésus de Nazareth, Dieu lui a donné l’onction d’Esprit Saint et de puissance. Là où il passait, il faisait
le bien et guérissait tous ceux qui étaient sous le pouvoir du diable, car Dieu était avec lui. »