Vincent était entré chez les dominicains en 1367, à l’âge de 17 ans ; un an plus tard, il prend l’habit et commence son noviciat et ses études. Ordonné prêtre en 1379, il est nommé la même année prieur du couvent de Valence. Devant la lourdeur de la charge (il n’a que 29 ans), il démissionne l’année suivante pour se consacrer à l’enseignement et à la prédication.
En 1385, l’évêque de Valence lui confie la chaire de théologie de son école cathédrale où sont formés les prêtres séculiers, mais que fréquentent aussi des religieux de divers ordres et des laïcs désireux de s’instruire. La qualité de son enseignement lui vaudra de recevoir de son ordre le titre de « Maître en théologie » lors du chapitre provincial de 1389.
Face au schisme qui déchirait l’Église, le roi Pierre IV d’Aragon avait adopté une attitude de neutralité ou d’indifférence, refusant de se prononcer pour Urbain ou pour Clément. Les États de la Couronne, officiellement, suivaient la posture du roi, tandis que le prince héritier soutenait le pape d’Avignon et que le peuple était dans un abîme de confusion et de perplexité.
Pour respecter la neutralité du roi, la municipalité de Valence interdit à Frère Vincent de prêcher en faveur d’Avignon. Il ne peut pas parler ? Il écrira ! C’est ainsi qu’il publie, en 1389, un Traité sur le schisme actuel de l’Église.
Il y développe quatre idées fondamentales :
Il ne peut y avoir deux papes dans l’Église de Jésus-Christ. C’est le chapitre le plus dense du traité qui développe la doctrine de saint Thomas d’Aquin.
Le vrai pape est Clément VII qui réside en Avignon puisque l’élection d’Urbain VI a été totalement nulle à cause des violences qui l’ont accompagnée.
Tous, y compris les rois et les princes, ont l’obligation, en conscience, de reconnaître le vrai pape et de lui obéir.
Aucun pouvoir temporel ne peut empêcher la prédication de la vérité sur l’élection du pape légitime.
Saint Vincent Ferrier défend avec une absolue certitude la légitimité du pape Clément. Le Cardinal Pedro de Luna qui participait au conclave de 1378, et avec qui il est ami depuis 1381, l’en a convaincu.
En 1390, Vincent Ferrier cesse ses enseignements à Valence pour accompagner le cardinal Pedro de Luna, que Clément VII envoie comme légat a u p r è s d e s cours royales de la péninsule ibérique pour plaider sa cause et travailler à la pacification de l’Église.
Clément VII meurt le 16 s e p t e m b r e 1394 et, le 28 septembre, le Cardinal Pedro de Luna est élu pour lui succéder. Il prendra le nom de Benoît XIII. Désormais les liens de l’amitié viendront conforter les arguments de la raison pour faire de Frère Vincent Ferrier le soutien le plus convaincu et l’apôtre le plus ardent de la papauté d’Avignon.
Dès qu’il fut élu, Benoît XIII appela Frère Vincent à venir le rejoindre à Avignon. Ce dernier obéit immédiatement à la demande du Pape et entreprit le voyage à pied, prêchant à chaque étape. Il arriva à Avignon au milieu de l’année 1395. Le Pape le reçut avec de vives démonstrations d’affection, le choisit comme confesseur et lui conféra les charges de chapelain, pénitencier Apostolique et maître du palais.
En plus de ces fonctions, il lui offrit le titre d’évêque de Lérida qu’il refusa, puis celui d’évêque de Valence, sa ville natale, qu’il refusa aussi. Bientôt le Pape le charge de missions diplomatiques et politiques auprès de différents souverains.