50 ans de la DCC

Le 23 juillet prochain la DCC (Délégation Catholique pour la Coopération) fêtera les 50 ans de sa création par une messe jubilaire à 10 h à la cathédrale de Nantes, présidée par Monseigneur Jean-Louis Papin, évêque de Nancy et évêque accompagnateur de la DCC.

A cette occasion, plusieurs volontaires de France vont être envoyés en mission dans différents pays. Leurs missions : promouvoir un développement durable et intégral, révéler la fraternité par la rencontre inter-culturelle, inviter à une expérience spirituelle. Témoignages de certains d’entre eux, originaires du Morbihan, pas encore partis ou déjà revenus :

Jean Jehanne, s’apprête à partir pour un an Liban à Jounieh, envoyé par la DCC suite à la demande de la Communauté religieuse de Notre Dame des Douleurs:
Jean sera accompagnateur au Foyer de Vieillards Notre Dame des Douleurs, maison de retraite d’une capacité de 65 lits qui appartient à la Congrégation Hospitalière Missionnaire des Filles de Notre Dame des Douleurs. C’est en 1904 que la Congrégation a envoyé les 1ères sœurs à Beyrouth. Le Foyer a pour mission d’accueillir les personnes âgées les plus démunies. Il compte actuellement 62 résidents dont 8 seulement sont autonomes.
« Après avoir passé trois années sur les bancs de l’université, et avec une licence en poche, j’avais vraiment envie d’une coupure. Plus que ça, je voulais partager, apprendre et surtout comprendre le monde qui m’entourait, rencontrer de nouvelles personnes, de nouvelles expériences de vie qui me feront grandir tout en apportant, en me mettant au service des autres. La DCC représentait pour moi un cadre solide avec lequel m’engager, par son accompagnement avant et pendant mon volontariat, et donnait une nouvelle dimension à mon engagement dans l’Eglise. J’ai assez perdu de temps pour moi, je me dois d’en accorder aux autres qui n’ont pas eu la même chance. Je ne pars pas pour résoudre toutes les inégalités et sauver le monde, mais pour apporter ma modeste contribution à un projet de développement beaucoup plus grand. »

Jean Jehanne, Paroisse Ste Anne d’Auray.

Jean sera envoyé en mission lors de la messe d’envoi du dimanche 23 juillet


Lauriane Buffé, jeune femme de 28 ans originaire de Vannes, a passé un an à Calcutta, envoyée par la DCC (Délégation Catholique pour la Coopération) en tant que Volontaire de solidarité internationale :
« Je reviens d’un an de mission de Volontariat de Solidarité Internationale avec la fondation Life Project 4 Youth. J’ai travaillé sur un projet d’insertion professionnelle de jeunes défavorisés et en situation d’extrême pauvreté  au cœur des bidonvilles de Calcutta en Inde.

C’est une volonté de mettre mes compétences professionnelles et personnelles au service de l’humain qui m’a poussé à partir. Je désirais vivre une expérience forte de sens, de partage, de don de soi et un souhait de vivre plus sobrement après 4 ans de vie professionnelle dans une grande multinationale en France et à l’étranger où je vivais un peu à cent à l’heure!

J‘ai été formée et envoyée par la Délégation Catholique pour la Coopération. Après avoir bien écouté mes choix et m’avoir aidée dans un temps de réflexion et d’introspection nécessaire à la maturation de ce projet, la DCC m’a proposé une mission à Calcutta au service des plus pauvres. J’ai accepté avec plaisir, l’Inde étant un pays que je trouvais fascinant!

Ma mission s’est déroulée en trois temps :
– Un temps de découverte, de rencontre et d’analyse des besoins dans plusieurs quartiers très pauvres de la ville pour établir la localisation d’un nouveau centre d’insertion professionnelle.
–  L’ouverture de notre centre d’insertion par l’entreprenariat, l’accueil des premiers jeunes et leur mise en projet.
–  Le coaching des jeunes au quotidien  en équipe de 15 et le démarrage d’un projet d’entreprenariat avec l’équipe de jeunes : un service traiteur itinérant  (Food Truck) servant une alimentation saine et équilibrée.
Après une année intense de découverte et d’immersion, je reviens transformée de cette aventure et me rends compte petit à petit des changements opérés en moi et autour de moi.
J’ai beaucoup appris des jeunes que je formais et qui ont vécu l’aventure à mes côtés. Je me suis rendue compte petit à petit que je n’étais pas là pour eux mais avec eux, et ensemble, nous avons grandis et appris les uns des autres. Et c’est là la beauté de l’expérience de volontariat, qui n’est jamais à sens unique.

A vivre parmi eux, je me suis d’autant plus rendue compte de la chance que j’avais eue dans mon enfance, et encore aujourd’hui, d’être entourée d’une famille, d’amis, de professeurs et mentors qui me soutiennent, m’encouragent, qui me poussent à aller plus loin, sans qui je ne serais pas devenue la personne que je suis aujourd’hui. Nous grandissons aux travers de nos rencontres, en nous confrontant aux autres, et le contexte culturel dans lequel nous évoluons  influence énormément notre capacité à nous insérer dans la société. J’aime beaucoup cette phrase de la Bible que Mère Thérésa reprenait souvent dans ses textes :  « Qui est-ce qui te distingue? Qu’as-tu que tu n’aies reçu? Et si tu l’as reçu, pourquoi te glorifies-tu, comme si tu ne l’avais pas reçu? » (I Cor 4,7.) Cette réflexion change le regard dur que l’on peut avoir parfois sur les autres qui s’en sortent moins bien, les abîmés de la vie, ceux qui viennent de parcours violent ou ceux qui ont eu une enfance volée, trop vite jetés dans la vie d’adulte. Cette expérience m’a rendue plus tolérante et ouverte aux autres, elle m’a appris à voir au-delà des clichés, à toujours essayer de découvrir l’humain derrière les masques. L’expérience de volontariat nous ré-apprend l’humilité aussi, et à ne pas prendre pour acquis les chances que l’on a de vivre dans un confort matériel et affectif, et nous rend capable de les réapprécier au quotidien.

Grâce à eux, j’ai changé de regard sur les plus démunis également. Les jeunes et leur famille m’ont impressionnée par leur capacité de résilience, de rebondir après des épreuves, de toujours aller de l’avant et surtout, de continuer de rire et sourire même dans la plus grande pauvreté. L’insertion professionnelle des personnes en difficulté est aujourd’hui une thématique qui me touche et dans laquelle j’aimerais continuer à m’engager, professionnellement ou dans le milieu associatif dans mes futurs projets.
D’un point de vue personnel, j’ai aussi beaucoup appris à me détacher, à lâcher prise, à vivre plus sereinement et à être plus patiente!  Même si c’est toujours difficile pour moi ! 🙂
C’est donc aujourd’hui une volonté de changement qui marque mon retour de mission, vers plus de simplicité, d’ouverture aux autres, de partage et une volonté de vivre autrement, pour un peu prolonger ce que j’ai appris et vécu en mission. J’ai aujourd’hui envie de voir les choses de manière plus positive, de consommer de manière plus écologique et respectueuse de notre belle planète, de m’engager pour des causes qui me touchent, d’oser rejoindre des initiatives citoyennes qui veulent faire bouger les choses, pour une société plus juste et tournée vers le futur. »


Claire et Pierre Millet sont partis deux ans (2012-2014), envoyés par la DCC en Guinée Conakry (Koundara) à la demande des Sœurs de St Charles d’Angers, sur un projet de développement de deux écoles primaires :

• Comment cette expérience a-t-elle changé votre vision du monde : 

Claire : Vivre auprès des Guinéens a profondément réinterrogé notre rapport à la consommation. Nous ne pouvons plus acheter sans essayer de réfléchir à qui produit ce bien, qui a travaillé et dans quelles conditions, quelle pollution est induite par cet achat, et par voie de conséquence quel impact il aura sur le creusement des inégalités entre les populations. Nous voulons tenter de rétablir, à notre toute petite échelle, dans notre quotidien, la dignité de tous les hommes.
La question des immigrés nous interpelle également beaucoup : avoir été témoins des conditions si rudes d’une vie radicalement aride, où la mort frappe chaque année, sans prévenir, nombre de familles, où l’hôpital n’accueille que le malade qui a réussi à réunir pièce après pièce la somme indécente qu’on lui réclame pour le soigner, où la pluviométrie détermine encore si les parents auront de quoi nourrir leurs enfants jusqu’à la fin de l’année… la population au sein de laquelle nous vivions ne traversait ni guerre ni persécution, et pourtant notre vie occidentale ne représente qu’une indescriptible injustice face à tout cela…
Et c’est pourtant eux qui nous ont appris l’Accueil : l’accueil sans compter, sans prévisionner : « Tu frappes à ma porte ? Tu passes devant moi qui mange avec mes 7 enfants ? Invitation ! Viens te joindre à nous ! » nous lançaient-ils invariablement, quelle que soit la taille du plat, nous qui avions pourtant l’air rassasiés… « Tu es fatigué ? Reste pour la nuit mon ami, on va se pousser ! Tu es là chez toi ! »… Quelle leçon pour nous…

Pierre : Cette expérience nous a donné une ouverture toute nouvelle sur le monde, sur d’autres manières de faire, de penser, de vivre au quotidien que les nôtres. J’en ressors avec une vision du monde plus fraternelle : un monde dans lequel nous sommes appelés à vivre en frères, quelle que soit notre origine mais aussi notre religion. J’en ai gardé également une vision du monde parfois dure, mais où des hommes et des femmes se donnent au quotidien pour le rendre meilleur.

• Comment cette expérience a touché votre vie personnelle :

Claire : Vivre avec les Guinéens m’a (ré)appris  à vivre dans un rapport filial au Père : nous avons appris auprès d’eux à nous confier à Dieu en enfants, lui confiant, à leur exemple, toute notre vie, remettant notre aujourd’hui et notre demain avec confiance entre ses mains.

Pierre : en nous ouvrant à une autre réalité du monde, cette expérience m’a appris à vivre au quotidien en pensant au-delà de mes propres intérêts. Nous sommes aussi rentrés de ce volontariat avec le souhait de continuer à nous engager, ici et maintenant, contre les inégalités. Nous avons aussi reçu le désir de témoigner de ce que nous avons vu et vécu.
Mon rapport à l’Autre et à l’étranger a également aussi beaucoup changé : je n’ai plus peur de celui qui est différent, j’ai au contraire pris goût à aller à sa rencontre pour découvrir un peu plus cette différence et apprendre à mieux le connaître.
Enfin ces deux années loin de chez moi m’ont appris à me connaître bien mieux moi-même.

• Et votre vie de couple :

Claire : Partir ainsi ensemble sur cette expérience a donné de vraies racines à notre couple : ensemble nous avons affronté quelques tempêtes, éprouvé des sentiments parfois difficiles, mais aussi rencontré l’Autre, appris… et tellement reçu surtout : ces deux années de volontariat de solidarité internationale ont donné une base différente à notre couple : avec parfois quelques grains de folies dans notre ciment…mais pour des fondations tellement plus solides, je crois !

Pierre : Je dirais que l’expérience du volontariat nous a sortis de notre confort et de toutes nos certitudes : une telle expérience en couple, « ça passe ou ça casse !! » : nous avons vécu de grands moments de joie, mais aussi d’autres plus difficiles. Au final notre couple en est ressorti avec des bases plus solides, et une vision commune du cap sur lequel nous voulions mettre la barre pour notre projet de vie et de famille.

• De quelle façon vos projets et choix de vie sont influencés par votre volontariat :

Claire : Ils en ont clairement été renversés, bousculés, remaniés : nos proches sont les premiers à pouvoir en témoigner, je crois : nous sommes revenus nous-mêmes, mais avec une vision de la Vie si différente : une vision enrichie, secouée, interrogée sous mille facettes ! Nous revenons délestés de beaucoup de certitudes, mais enrichis de tant d’envies de découvrir l’Autre, de comprendre la différence de son point de vue, de l’écouter, d’apprendre à l’aimer avant de le juger. Si ne devions citer qu’une chose de ce que la DCC nous a transmis ce serait bien cela !

Pierre : Cette expérience nous a confortés dans les priorités que nous voulions donner à notre vie, au quotidien, et dans nos projets d’avenir. Sur le plan professionnel, remettre du sens au cœur de notre travail ou plutôt retrouver un travail plus porteur de sens ! Mais aussi dans nos engagements bénévoles et notre vie de famille.
Personnellement, j’ai trouvé la foi pendant ce volontariat : cette expérience m’a intimement rapproché du Christ et donné envie de lui donner une place centrale dans ma vie pour éclairer nos choix au quotidien et nos projets d’avenir.

• Enfin, pensez-vous que l’éducation de vos enfants en soit différente :

Claire : Deux petits garçons sont venus illuminer notre vie depuis cette expérience. Nous les avons certainement accueillis bien différemment de la façon dont nous l’aurions fait sans ce volontariat. Je ne sais pas encore bien nommer ce que cela aura changé dans ce rapport à l’éducation de nos enfants, mais une chose est certaine : la vision que nous avons de la vie a été bouleversée par tout ce que nous avons vécu avec nos frères guinéens. Tout cela, nos enfants le sentent, l’entendent et le reçoivent, c’est une certitude !

Pierre : Nous avons, depuis cette expérience, le souhait de les ouvrir à la diversité, de leur donner un rapport d’ouverture à l’autre, à l’étranger.
Le souhait aussi de les éduquer à un rapport différent à la consommation pour vivre plus en sobriété et dans une certaine forme de simplicité. 

Claire et Pierre, Paroisse St Pierre Cathédrale de Vannes